Le premier parlement de la France d’Ancien Régime se développe au XIIIe siècle à partir du Conseil du roi (français : Conseil du roi, latin : curia regis), et jouit par conséquent de prérogatives consultatives et délibératives anciennes et coutumières.
St Louis n’établit qu’une seule de ces cours de la couronne, qui n’avait pas de localité fixe, mais le suivait partout où il allait.
Le « parlement » de St. Louis se composait de trois hauts barons, de trois prélats et de dix-neuf chevaliers, auxquels s’ajoutaient dix-huit conseillers ou hommes instruits en droit.
Ces juristes, vêtus de longues robes noires, s’asseyaient sur des bancs au-dessous des hauts nobles ; mais comme ceux-ci leur laissaient toutes les affaires de la cour, ils devinrent bientôt les seuls juges, et formèrent le noyau de la magistrature française actuelle.
Philippe le Bel fut le premier à fixer cette cour à Paris, en 1302, la séparant officiellement du Conseil du roi en 1307. Le Parlement de Paris tenait ses séances à l’intérieur du palais royal médiéval de l’île de la Cité, aujourd’hui encore le site parisien du Palais de justice. Le Parlement avait également pour mission d’enregistrer tous les édits et lois royaux. Au XVe siècle, le Parlement de Paris disposait d’un droit de « remontrance au roi » (exposé formel des griefs), qui n’avait d’abord qu’un caractère consultatif.
En attendant, la juridiction du Parlement de Paris couvrait tout le royaume comme au XIVe siècle, mais n’avançait pas automatiquement au rythme de l’expansion constante du royaume de la Couronne. En 1443, après les troubles de la guerre de Cent Ans, le roi Charles VII de France accorde au Languedoc son propre parlement en créant le Parlement de Toulouse, le premier parlement hors de Paris ; sa juridiction s’étend sur la majeure partie du sud de la France. De 1443 jusqu’à la Révolution française, plusieurs autres parlements seront régulièrement créés dans toute la France (voir § Liste des parlements et conseils souverains de France, ci-dessous) ; ces lieux étaient les capitales provinciales de ces provinces ayant de fortes traditions historiques d’indépendance avant d’être annexées à la France (dans certaines de ces régions, les États généraux provinciaux ont également continué à se réunir et à légiférer avec une certaine autonomie et un contrôle sur la fiscalité dans leur juridiction).
XVIe et XVIIe sièclesModification
Au fil du temps, certains parlements, notamment celui de Paris, prennent progressivement l’habitude d’utiliser leur droit de remontrance pour refuser d’enregistrer les lois, qu’ils jugent soit intempestives, soit contraires au droit coutumier local (et il y avait 300 juridictions de droit coutumier), jusqu’à ce que le roi tienne un lit de justice ou envoie une lettre de jussion pour les obliger à agir. Au XVIe siècle, les juges du parlement estiment que leur rôle inclut une participation active au processus législatif, ce qui les met en conflit avec l’absolutisme monarchique croissant de l’Ancien Régime, le lit de justice évoluant au cours du XVIe siècle d’un forum constitutionnel à une arme royale, utilisée pour forcer l’enregistrement des édits. La transmission des charges judiciaires était également une pratique courante en France depuis la fin du Moyen Âge ; la titularisation à la cour était généralement achetée à l’autorité royale ; et ces charges officielles pouvaient être rendues héréditaires par le paiement d’un impôt au roi appelé la paulette. Rassemblés dans les parlements, les membres largement héréditaires, les nobles provinciaux de la robe constituaient la force décentralisatrice la plus puissante dans une France qui était plus multiforme dans ses systèmes juridiques, sa fiscalité et ses coutumes qu’elle n’aurait pu le paraître sous l’apparente règle unificatrice de ses rois. Néanmoins, le Parlement de Paris avait la plus grande juridiction de tous les parlements, couvrant la majeure partie du nord et du centre de la France, et était simplement connu comme « le parlement ».
La FrondeEdit
Le Parlement de Paris a joué un rôle majeur en stimulant la noblesse à résister à l’expansion du pouvoir royal par la force militaire pendant la Fronde, 1648-1649. En fin de compte, le roi Louis XIV l’emporte et la noblesse est humiliée.
La capacité des parlements à retenir leur assentiment en formulant des remontrances contre les édits du roi oblige ce dernier à réagir, ce qui entraînait parfois une résistance répétée des parlements, à laquelle le roi ne pouvait mettre fin en sa faveur qu’en émettant une lettre de jussion et, en cas de résistance persistante, en se présentant en personne devant le parlement : le lit de justice. Dans ce cas, les pouvoirs du parlement étaient suspendus pour la durée de cette session royale. Le roi Louis XIV cherche à centraliser l’autorité entre ses mains et impose certaines restrictions aux parlements : en 1665, il ordonne qu’un lit de justice puisse être tenu sans que le roi ait à comparaître en personne ; en 1667, il limite le nombre de remontrances à une seule. En 1671-1673, cependant, les parlements résistent aux impôts nécessaires pour financer la guerre franco-hollandaise. En 1673, le roi impose des restrictions supplémentaires qui privent les parlements de toute influence sur les nouvelles lois en décrétant que les remontrances ne peuvent être émises qu’après l’enregistrement des édits. Après la mort de Louis en 1715, toutes les restrictions ont été supprimées par le régent, bien que certains des juges du Parlement de Paris aient accepté des pots-de-vin royaux pour restreindre cet organe jusque dans les années 1750.
Rôle menant à la Révolution françaiseEdit
Après 1715, sous les règnes de Louis XV et Louis XVI, les parlements ont contesté à plusieurs reprises à la couronne le contrôle de la politique, notamment en matière d’impôts et de religion. De plus, les parlements avaient pris l’habitude de voter des arrêts de règlement, qui étaient des lois ou des décrets réglementaires qui s’appliquaient dans leur juridiction pour l’application des édits royaux ou des pratiques coutumières. Lors d’une séance du Parlement de Paris en 1766 connue sous le nom de séance de la Flagellation, Louis XV affirma que le pouvoir souverain ne résidait que dans sa personne.
Dans les années qui précèdent immédiatement le début de la Révolution française en 1789, leur souci extrême de préserver les institutions de l’Ancien Régime relatives aux privilèges nobiliaires empêche la France de réaliser de nombreuses réformes simples, notamment dans le domaine fiscal, même lorsque ces réformes ont le soutien du roi.
Le chancelier René Nicolas de Maupeou cherche à réaffirmer le pouvoir royal en supprimant les parlements en 1770. Ses célèbres tentatives, connues sous le nom de réforme de Maupeou, se soldent par une bataille furieuse et un échec. Les parlements sont dissous et leurs membres arrêtés. Après la mort de Louis XV, les parlements furent restaurés.
Le début des changements radicaux proposés commença avec les protestations du Parlement de Paris adressées à Louis XVI en mars 1776, dans lesquelles le Second État, la noblesse, s’opposait au début de certaines réformes qui supprimeraient leurs privilèges, notamment leur exemption d’impôts. Ces objections sont faites en réaction à l’essai Réflexions sur la formation et la distribution des richesses d’Anne-Robert-Jacques Turgot. Le Second État réagit à cet essai avec colère pour convaincre le roi que la noblesse joue toujours un rôle très important et mérite toujours les mêmes privilèges d’exonération fiscale ainsi que pour la préservation des guildes et des corporations mises en place pour restreindre le commerce, toutes deux éliminées dans les réformes proposées par Turgot.
Dans leur remontrance contre l’édit supprimant la corvée (mars 1776), le Parlement de Paris – craignant qu’un nouvel impôt remplace la corvée, et que cet impôt s’applique à tous, introduisant l’égalité comme principe – ose rappeler au roi :
Le service personnel du clergé est de remplir toutes les fonctions relatives à l’éducation et aux observances religieuses et de contribuer par ses aumônes au soulagement des malheureux. Le noble consacre son sang à la défense de l’Etat et assiste le souverain par ses conseils. La dernière classe de la nation, qui ne peut rendre à l’État des services aussi distingués, remplit son obligation par l’impôt, l’industrie et le travail physique.
Le second état (la noblesse) représentait environ 1,5 % de la population française et était exempt de presque tous les impôts, y compris la Corvée Royale, qui était un service obligatoire récent dans lequel les routes seraient réparées et construites par les personnes soumises à la corvée. Dans la pratique, quiconque payait une petite taxe pouvait échapper à la corvée, de sorte que cette charge de travail ne tombait que sur les plus pauvres de France. Le Second État était également exempté de la gabelle, qui était l’impôt impopulaire sur le sel, et aussi de la taille, un impôt foncier payé par les paysans, et la plus ancienne forme d’imposition en France.
Le Second État craignait de devoir payer l’impôt remplaçant la corvée supprimée. Les nobles considéraient cet impôt comme particulièrement humiliant et inférieur à eux, car ils étaient très fiers de leurs titres et de leur lignée, dont beaucoup étaient morts pour défendre la France. Ils voyaient dans cette élimination du privilège fiscal la porte ouverte à d’autres attaques contre leurs droits et pressaient Louis XVI à travers les protestations du Parlement de Paris de ne pas promulguer les réformes proposées.
Ces exemptions, ainsi que le droit de porter une épée et leurs armoiries, encourageaient l’idée d’une supériorité naturelle sur les roturiers qui était commune à travers le Second État, et tant qu’un noble était en possession d’un fief, il pouvait percevoir une taxe sur le Tiers État appelée Dûreté féodale, qui serait prétendument pour la protection du Tiers État (cela ne s’appliquait qu’aux serfs et aux locataires de terres agricoles appartenant à la noblesse). Dans l’ensemble, le deuxième pouvoir jouit de vastes privilèges que le troisième pouvoir ne possède pas, ce qui a pour effet de protéger la richesse et les biens du deuxième pouvoir, tout en empêchant le troisième pouvoir d’avancer. Les réformes proposées par Turgot et combattues par les protestations du Parlement de Paris entrent en conflit avec les intérêts du Second État, qui souhaite conserver ses privilèges héréditaires, et constituent le premier pas vers une réforme qui s’infiltre dans l’arène politique. Les réformes de Turgot étaient également impopulaires parmi les roturiers, qui considéraient les parlements comme leur meilleure défense contre le pouvoir de la monarchie.